Billet d’humeur – La future CMG est-elle une usine à gaz ?
Brigitte de Lard-Huchet, directrice du centre de droit JuriSanté du CNEH
On les attendait, ils sont tous là ! Les textes sur la commission médicale de groupement hospitalier de territoire (CMG), tant attendus depuis la loi « Ma Santé 2022 » de juillet 2019. 2 textes encadrent cette commission du GHT, qui sera désormais obligatoire :
- L’ordonnance 2021-291 du 17 mars 2021, qui introduit un nouvel article L.6132-2-1 dans le code de la santé publique (CSP),
- Le décret 2021-675 du 27 mai 2021, qui fixe les compétences, la composition et les conditions de fonctionnement de la CMG.
Pour les 80% de GHT qui avaient opté pour un collège médical, la transition va être rude. Alors que ces GHT disposaient d’une liberté quasi-totale sur le fonctionnement et les attributions de leur collège médical de groupement, ils devront désormais tous constituer une instance qui a tout d’un organe hospitalier : normes administratives de fonctionnement et de tenue, quorum, attributions désormais réglementaires…
Et ce ne sont pas les règles de composition qui feront de la CMG une instance agile. Selon le nouvel article R.6132-9 CSP, la CMG comprend, avec voix délibérative :
- Les présidents des CME des établissements parties au groupement;
- Les chefs de pôle d’activité clinique et médico-technique inter-établissements, et les coordonnateurs des FMIH mises en place entre tout ou partie des établissements parties au groupement;
- Le médecin responsable du département de l’information médicale de territoire;
- Des membres représentant les personnels médicaux, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, désignés par chaque CME en son sein et, pour les établissements et services médico-sociaux parties au groupement, selon des modalités définies par la convention constitutive.
Elle comprend également, avec voix consultative:
- Le président du comité stratégique et les directeurs des établissements parties au groupement ou leur représentant;
- Le président de la CSIRMT du groupement;
- Les directeurs d’unité de formation et de recherche (UFR) de médecine ou le président du comité de coordination de l’enseignement médical et, le cas échéant, le directeur d’UFR de pharmacie et le directeur d’UFR d’odontologie, si un CHU est partie au groupement;
- Un représentant des coordonnateurs de la gestion des risques associés aux soins, désigné par le directeur de l’établissement support;
- Un professionnel médical représentant, le cas échéant, les communautés psychiatriques de territoire, désigné par elles.
Soit au bas mot, pour un GHT de 10 établissements de santé, une quarantaine de personnes.
Et ce, sans compter la possibilité pour la convention constitutive de prévoir la présence, avec voix consultative, d’autres personnes exerçant des fonctions dans les établissements parties au groupement, dans une proportion qui ne peut dépasser 10% du nombre total des membres de la commission, ou la possibilité pour la CMG de désigner au plus cinq invités représentant des partenaires extérieurs coopérant avec le groupement ou avec les établissements parties dans la mise en œuvre d’actions de santé publique sur le territoire.
La lourdeur comme prix à payer pour relever le défi de la représentativité maximale. Et une convention constitutive qu’il va falloir modifier selon une procédure très lourde car elle associe presque toutes les instances des établissements parties.
Etonnant choix que de structurer administrativement de façon très rigide la représentation médicale du GHT, alors même que les derniers textes ne disent pas un mot (ou presque) du projet médical partagé, véritable cœur de réacteur du GHT, et dont la première itération devrait s’achever à l’été 2022, avec une réussite très variable selon les territoires.
Priorité à la gouvernance plutôt qu’au projet ?
Le risque d’une usine à gaz pour la CMG, en tous les cas, à mettre en place d’ici 2022…