FICHE DE SYNTHESE – Evolution des dispositions relatives au financement a la qualité
Brigitte de LARD-HUCHET – Directrice du centre de droit JuriSanté du CNEH
La réforme « Ma santé 2022 » présente la particularité, à la différence des précédentes, d’être annoncée sous forme de « plan national » constitué non pas seulement d’une loi, mais de plusieurs vecteurs juridiques et institutionnels pour porter les mesures que le gouvernement entend mettre en œuvre. Si le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé est très attendu, il ne doit pas faire oublier que:
- certaines mesures seront déclinées directement par voie réglementaire (par exemple certains aspects de la réforme de la gouvernance hospitalière),
- d’autres sont déjà édictées, ou en cours de l’être par des textes législatifs ou réglementaires.
C’est le cas des mesures relatives au financement à la qualité. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 introduit en effet, en son article 37, une modification de ce dispositif, qui constitue un des piliers de la réforme du financement des établissements de santé, en cours de conception sous la responsabilité de la task force dirigée Jean-Marc AUBERT.
deux points saillants sont à retenir à cet égard:
– la dotation de financement à la qualité passera de 60 à 300 millions d’euros, créant un véritable levier incitatif pour les établissements, et contre-balançant à cet égard le financement à l’activité (T2A), construit autour d’une logique quantitative;
Le décret n° 2019-121 du 21 février 2019 portant modification de dispositions réglementaires du code de la sécurité sociale relatives à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins est venu préciser les conditions de cette mesure, qui concerne les établissements exerçant une activité de MCO (médecine, chirurgie, obstétrique) ou de soins de suite (SSR).
Les catégories des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins dont le respect par les établissements peut ouvrir droit à la dotation complémentaire (art.L.162-23-15 CSS) sont les suivantes :
– 1° Qualité des prises en charge perçue par les patients ;
– 2° Qualité des prises en charge cliniques ;
– 3° Qualité des pratiques dans la prévention des infections associées aux soins ;
– 4° Qualité de la coordination des prises en charge ;
– 5° Performance de l’organisation des soins ;
– 6° Qualité de vie au travail ;
– 7° Démarche de certification.
Les indicateurs sont fixés par un arrêté ministériel qui devrait paraître d’ici le 23 mai 2019.
Le montant de la dotation complémentaire est déterminé, dans des conditions fixées ici encore par arrêté, en fonction :
– 1° Des résultats de l’établissement de santé pour chaque indicateur;
– 2° De l’évolution des résultats obtenus par l’établissement de santé pour chaque indicateur mesuré au cours de l’année civile considérée comparativement aux dernières mesures disponibles ;
– 3° Du groupe de comparaison auquel l’établissement appartient ;
– 4° De l’activité produite par les établissements de santé au cours de l’année civile précédent l’année considérée.
- Ce qui est nouveau, c’est l’introduction d’un dispositif de pénalité financière. Ainsi, pour certains des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins, un seuil minimal de résultats est requis. Lorsqu’un établissement de santé n’atteint pas, pendant trois années consécutives, un tel seuil minimal pour un même indicateur, l’établissement concerné peut faire l’objet d’une pénalité financière notifiée par le directeur général de l’agence régionale de santé (DG ARS).
Toutefois, le DG ARS peut estimer, par décision spécialement motivée, qu’il n’y a pas lieu à sanction au regard de circonstances particulières propres à l’établissement concerné.
Le montant de la pénalité financière globale est apprécié en fonction du nombre d’indicateurs concernés et de la gravité des manquements constatés. La pénalité financière globale ne peut excéder un montant équivalent à 0,5 % des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement.
Lorsque, pour une année donnée, un établissement n’atteint pas le seuil minimal requis pour un indicateur, il en est alerté par le DG ARS qui lui indique la pénalité financière encourue en cas de manquement constaté pendant trois années consécutives et propose des mesures d’accompagnement.
L’établissement faisant l’objet d’une pénalité financière présente un plan d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, élaboré dans les conditions prévues aux articles L. 6144-1 ou L. 6161-2-2 du code de la santé publique.
Reste à voir, sur le terrain, l’application que les ARS feront de cette mesure, car elles rechignent souvent à entrer dans un dispositif de pénalités à l’égard des établissements de santé. En son temps, un dispositif similaire de pénalité en cas de non-respect des objectifs quantifiés de l’offre de soins (OQOS) n’avait pas rencontré un grand succès…