Article – Le référent laïcité, un aboutissement législatif logique ou un mal nécessaire ? Quid dans les établissements de soin?

Catégorie : Droits des patients, exercice professionnel, responsabilité
Date : 20/06/2022

Céline Berthier et Isabelle Génot Pok, juristes, consultantes au Centre de droit JuriSanté du CNEH

Article paru dans la revue Gestions Hospitalières, n° 616 – mai 2022

Plus de 115 ans après la promulgation de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, le gouvernement a estimé à nouveau nécessaire [1] de renforcer l’arsenal juridique par une nouvelle loi renforçant les principes de la République [2], deux décrets [3] et une instruction [4]. À la lecture du décret créant le référent laïcité et de l’instruction qui s’est ensuivie, depuis le 25 avril 2022, tout établissement de santé public ou médico-social public doit en désigner un. On peut s’interroger toutefois sur la nécessité de passer par un tel dispositif juridique si ce n’est dû au constat de l’impuissance actuelle des institutions étatiques à faire respecter ce principe si profondément lié à notre histoire et qui, depuis plusieurs années, montre des incertitudes croissantes dans son application.

La laïcité « à la française », pourtant sans ambiguïté dans le texte, ne cesse de créer des zones de tolérance qui permettent à tous (personnalités, politiques, intellectuels militants, associations…) d’adopter des positions divergentes tout en invoquant un même principe : la laïcité. Ainsi, malgré une structure juridique solide et constante depuis 1905 [5], il est toujours nécessaire de redéfinir le principe et de créer des outils ou moyens de le faire appliquer.

La laïcité, c’est quoi ?

Définition

La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État a institué le principe de laïcité en France. Reconnu de valeur constitutionnelle par la Constitution de 1946, confirmé par l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958, et comme principe fondamental établi par les lois de la République en 2001 [6], ce principe instaure la liberté de conscience des citoyens et la neutralité de l’État et de ses services publics (par extension des collectivités territoriales et des établissements et services publics rattachés). Corollaires du principe d’égalité, les principes de neutralité et de laïcité s’imposent à tous les fonctionnaires et agents des services publics. En découle l’obligation de non-discrimination des usagers du service public.

La laïcité se définit comme « la garantie de la liberté de conscience. De celle- ci découle la liberté de manifester ses croyances ou convictions dans les limites du respect de l’ordre public. La laïcité implique la neutralité de l’État et impose l’égalité de tous devant la loi sans distinction de religion ou conviction ». Elle garantit donc « aux croyants et aux non-croyants le même droit à la liberté d’expression de leurs croyances ou convictions. Elle assure aussi bien le droit d’avoir ou de ne pas avoir de religion, d’en changer ou de ne plus en avoir. Elle garantit le libre exercice des cultes et la liberté de religion, mais aussi la liberté vis-à-vis de la religion : personne ne peut être contraint au respect de dogmes ou prescriptions religieuses [7] ».

La laïcité dans sa conception française originale, on ne cessera pas de le répéter, n’est pas une opinion parmi d’autres, mais la liberté d’en avoir une. Elle n’est pas une conviction non plus, mais le principe qui les autorise toutes, sous respect de l’ordre public. Son application peut donc être limitée, dès lors qu’elle viendrait en contradiction avec cet ordre public dont le rôle est de maintenir l’équilibre démocratique en préservant la liberté de chacun [8].

Dès lors, si la République française assure l’égalité des citoyens face au service public, quelles que soient leurs convictions ou croyances, le service public ne peut donc montrer une préférence, ou faire preuve d’une attitude discriminatoire, selon l’appartenance religieuse, réelle ou présumée de ses usagers. Les agents du service public quels qu’ils soient, pendant l’exercice de leurs fonctions, représentent l’État, et à ce titre, ils ne peuvent en aucun cas marquer de préférence, ni laisser supposer un comportement discriminatoire (que celui-ci soit positif ou négatif) de leur part (ce qui implique entre autres, aucune présence de signe religieux dans leur bureau ou aucun port de tel signe, ni comportement ou parole tendancieux) (encadré 1).

Toutefois, s’il est facile pour l’État d’exposer ce principe, il est bien plus délicat de le faire appliquer par tous les acteurs publics ou privés tels que les élus, les responsables des collectivités, les agents publics et les usagers.

Un principe inhérent au fonctionnement d’un établissement public de soins

D’application quotidienne dans toutes les structures publiques, et d’autant plus pour celles qui accueillent, prennent en charge et ou et hébergent des usagers, tel que les établissements de soins (sanitaire comme médico-social), la laïcité est un principe vivant qui relève cependant d’une spécificité liée à la situation des usagers, mais aussi aux statuts de certains professionnels de santé qui y exercent. Il s’agira donc pour ce nouveau référent de maîtriser ce principe dans tous ses aspects et de savoir le combiner aux conditions d’exercice dans le service public hospitalier et médico-social, d’apporter conseil et appui afin de préserver un équilibre comportemental juste et acceptable pour tous.

Déjà, la circulaire de 2017 rappelait que dans l’exercice de leurs fonctions, les agents publics sont tenus de respecter le principe de laïcité dans toute cette dimension, c’est-à-dire de servir et de traiter de façon égale et sans distinction tous les usagers, quelles que soient leurs convictions philosophiques ou religieuses, en faisant preuve d’une stricte neutralité. Les agents publics ne doivent marquer aucune préférence à l’égard de telle ou telle conviction, ni donner l’apparence d’un tel comportement préférentiel ou discriminatoire, notamment par la manifestation, dans l’exercice de leurs fonctions, de leurs convictions religieuses.

L’article L.121-2 du code général de la fonction publique (CGFP) [9] dispose dans son titre II relatif aux obligations générales, que « l’agent public, dans l’exercice de ses fonctions, est tenu à l’obligation de neutralité ». Le même article ajoute « qu’il exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. À ce titre, il s’abstient notamment de manifester ses opinions religieuses. Il est formé à ce principe. L’agent public traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité ».

Par « agent public » il convient d’entendre le fonctionnaire et l’agent contractuel. Attention, concernant les établissements de soins, les professionnels médicaux sont aussi concernés par le principe de laïcité au titre de l’article L. 6112-1 du CSP en ce qu’ils exercent au sein d’une structure publique [10]. Il en va de même pour les personnels médicaux qui n’ont pas la plénitude d’exercice tel que les médecins à diplôme étranger sous contrat ou convention de stage [11] (encadré 1).

Aussi, avec un tel principe ancien et connu des structures publiques, il persiste encore bien des difficultés d’intégration dans les pratiques de terrain.

Jusqu’où aller pour faire respecter le principe de laïcité ?

Ce principe semble donc toujours rencontrer bien des résistances, dans le quotidien des personnels, mais aussi auprès des directions des établissements de santé. Et les habitudes ont la vie dure. On peut encore constater des difficultés de compréhension et donc de mise en oeuvre de ce principe, malgré une construction juridique et managériale intensive depuis 2016 [12].

On pourrait par exemple, trouver une explication dans le fait que chaque professionnel, dès lors qu’il ne se sent pas gêné ou atteint dans ses convictions ou conceptions par le comportement ou un signe porté par un autre collègue, a du mal à comprendre en quoi cela dérange, en quoi cela va à l’encontre de la laïcité. On repère aussi, une certaine confusion entre la culture, l’histoire et la laïcité (au moment des fêtes de Noël ou de Pâques). Par ailleurs, certaines situations permettent la mise en avant de convictions religieuses et ou philosophiques venant contrecarrer le principe de laïcité.

La clause de conscience en est certainement l’exemple le plus notoire. Accordée à certains professionnels de santé (médecins, soignants, sages-femmes) pour des motifs de conviction religieuse ou pas (ils n’ont d’ailleurs pas à motiver leur décision), elle les autorise exceptionnellement à mettre de côté leur neutralité de façon ponctuelle et pour certains actes seulement, mais elle ne peut en aucune manière (et c’est là sa limite) leur permettre de ne pas appliquer le principe de continuité des soins. Ils doivent impérativement orienter, le ou la patient/e vers un autre professionnel ou une autre structure (encadré 3). La difficulté sera alors de faire comprendre en quoi il ne peut y avoir place à une quelconque tolérance dans l’application stricte du principe de laïcité, hors de ce que les textes prévoient, puisque l’obligation de neutralité imposée aux agents publics n’accepte par principe aucune nuance. On est neutre ou on ne l’est pas. Aussi, l’article 3 de la loi du 24 août 2021 [13] a consacré la fonction de
référent laïcité, initialement créé par circulaire en 2017 et désormais inscrit à l’article L.124-3 du CGFP [14]. Et si le décret du 23 décembre 2021 [15] vient préciser ses missions, il est clair qu’au-delà d’un texte, c’est de son effectivité et de son efficacité qu’il s’agit ! Que pourra-t-il faire de plus ou de mieux, si on ne lui octroie pas les moyens adéquats, à commencer par son positionnement dans la structure ?

Le rôle du référent laïcité à l’épreuve de sa légitimité

Une fiche de poste précise

De manière générale, le référent laïcité est chargé d’apporter tout conseil utile au respect du principe de laïcité à tout fonctionnaire ou chef de service qui le consulte, de sensibiliser les agents publics à la laïcité. Et de manière plus précise, il exerce les missions suivantes :

  • le conseil aux chefs de service et aux agents publics pour la mise en oeuvre du principe de laïcité, notamment par l’analyse et la réponse aux sollicitations de ces derniers portant sur des situations individuelles ou sur des questions d’ordre général ;
  • la sensibilisation des agents publics au principe de laïcité et la diffusion, au sein de l’administration concernée, de l’information au sujet de ce principe ;
  • l’organisation, à son niveau et, le cas échéant, en coordination avec d’autres référents laïcité, de la journée annuelle de la laïcité le 9 décembre.

À la demande du directeur de l’établissement, le référent peut être sollicité en cas de difficulté dans l’application du principe de laïcité entre un agent et des usagers du service public. Il doit rédiger un bilan annuel qu’il adresse au directeur de sa structure et une synthèse de celui-ci est transmise aux membres du comité social (encadré 4).

Les modalités d’exercice des missions peuvent être précisées par le directeur.

Le choix de l’agent : un gage de légitimité ?

Selon le texte [16], le référent laïcité est désigné à un niveau permettant l’exercice effectif de ses fonctions, déterminé par le directeur de l’établissement. Il doit être obligatoirement choisi parmi les fonctionnaires (en activité ou retraités) ou parmi les agents titulaires d’un contrat de travail à durée indéterminée (contractuels en CDI) de la structure. Il est de la responsabilité de ce dernier, en tant que chef d’établissement, de choisir l’agent le plus apte parmi l’ensemble du personnel, sans distinction ni préjugé lié à son métier ou fonction d’origine, à assurer cette mission. Cependant, ce choix doit se faire à un niveau permettant l’exercice effectif de ses fonctions. Cette exigence implique deux réflexions à mener par les chefs d’établissement :

  • l’agent doit avoir un niveau hiérarchique suffisant pour asseoir sa légitimité auprès des autres personnels de la structure ;
  • l’agent ne doit pas se retrouver en situation conflictuelle au regard d’autres fonctions qu’il exercerait.

Ainsi, dans les structures sanitaires et médico-sociales, le référent doit au moins être issu de la catégorie B voire A, faute de quoi sa légitimité et sa position ne lui permettront pas de faire valoir au mieux son autorité et ses compétences. Il faut être vigilant au piège dans lequel les directeurs d’établissement peuvent facilement tomber : le fait de nommer des responsables/référents parmi des agents de catégorie inférieure à celle requise par l’importance des fonctions, ce qui en général a pour effet de sabrer toutes leurs possibilités de faire accepter leur rôle et respecter leurs directives ou conseils. On pourrait citer à cet égard, les responsables de services d’archives, les responsables des relations avec les usagers, les délégués à la protection des données… Toutefois, dans le cas du référent laïcité, à l’instar du référent déontologue, le texte donne quelques indications sur son positionnement hiérarchique. Il lui reviendra, mais aussi au directeur de l’établissement, de confirmer cette position dans l’exercice de ses fonctions et d’asseoir sa légitimité par sa compétence et sa posture neutre. Ce qui implique aussi pour le directeur d’être très attentif aux fonctions ou métiers qu’exerce déjà l’agent envisagé. Car il est à parier que ce référent n’aura pas que cette mission à mettre en oeuvre. C’est la question de sa propre neutralité qui se pose alors afin de s’assurer de sa stricte impartialité aux yeux des agents. Autrement dit choisir un membre de la DRH ne sera pas forcément pertinent.

On notera une particularité s’agissant des modalités d’organisation de cette mission : une « souplesse » est accordée en ce sens aux établissements de santé, qui pourront mutualiser leur référent laïcité au sein du groupement hospitalier de territoire auquel ils appartiennent, dès lors que cette organisation s’avérera pertinente. On est ici aussi en face d’une autre réflexion à mener sur cette pertinence au regard des missions, des actions et de la proximité nécessaire avec les pratiques de terrain.

Quels moyens d’action réels pour être efficace ?

Les moyens sont à la discrétion du directeur, c’est sans doute une difficulté supplémentaire pour le référent. Le premier des moyens nécessaires est d’être solidement formé sur ce principe afin d’avoir de la capacité de relever les écarts entre les pratiques les attitudes et le respect du principe de laïcité. Mais d’autres seront nécessaires tels que la liberté d’action, de parole, de conseil, de circulation, la possibilité de recevoir tout agent de manière confidentielle [17], d’où des moyens matériels mis à disposition. Lui laissera-t-on la liberté et l’indépendance nécessaire pour relever les pratiques non conformes au principe de laïcité qui n’auront pas été gérées en amont? Quelle sera sa réelle marge de manoeuvre pour qu’il exerce ses missions ?

Par ailleurs, le directeur doit informer, par tout moyen permettant d’assurer une publicité suffisante, les agents placés sous son autorité de la désignation du référent laïcité et des modalités permettant d’entrer en contact avec ce dernier. Dès lors le référent doit disposer d’un temps de travail adéquat autant pour réaliser ses missions que pour être disponible pour le personnel. On peut craindre l’effectivité de sa fonction, si l’agent désigné exerce déjà d’autres missions au sein de la structure. Le principe de « cumul de missions » n’est pas rare dans les établissements de soins !

Mais le reporting prévu auprès de l’ARS [18] pourra peut-être être le levier nécessaire pour ancrer les missions du référent laïcité et le légitimer auprès de la direction. Il est prévu, en effet, que le référent échange trimestriellement avec l’ARS (tout du moins un avec un correspondant). Leur objet portera sur le nombre et la nature des manquements constatés dans chaque établissement de manière anonyme. La finalité de ce dispositif est d’améliorer la connaissance statistique des manquements à l’obligation de neutralité des agents publics constatés dans ces établissements. De plus, les informations concernant les manquements constatés doivent être reportées par le référent laïcité sur un formulaire mis à sa disposition par le ministère chargé de la santé. Elles sont transmises chaque trimestre au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales et à l’agence régionale de santé territorialement compétente, par voie électronique et dans des conditions garantissant la confidentialité et l’intégrité des informations échangées. Espérons que cette organisation aide aussi à la mise en place d’actions permettant de réduire les situations d’irrespect du principe de laïcité.

Mais, la question de son ancrage et de sa légitimité institutionnelle passera également par son lien avec les autres référents de l’établissement dont les champs d’action ne sont guère éloignés de la laïcité.

Interactions avec les autres référents

La mise en place de référents laïcité s’inscrit dans les « 17 décisions pour la laïcité » annoncées en juillet 2021 par le Premier ministre Jean Castex, avec pour objectif premier la prévention de la radicalisation des agents.

Véritable relais chargé d’assurer le respect des valeurs de la République, quel sera son rôle aux côtés des autres référents de l’établissement ? Rappelons que les établissements de santé doivent avoir nommé un référent déontologue depuis 2017 et un référent égalité hommes/femmes depuis 2021.

L’action 1.5 de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique signé le 30 novembre 2018 prévoit la désignation, à compter du 1er janvier 2022, d’un/e référent/e égalité au sein de chaque établissement de santé, social ou médico-social. Comme précisé par une instruction de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) [19] du 29 octobre 2021, son rôle est :

  • d’informer les agents relativement à la politique d’égalité professionnelle menée par l’établissement ;
  • de réaliser des actions de sensibilisation des agents à l’égalité professionnelle ;
  • de conseiller les agents et les services s’agissant des sujets liés à l’égalité professionnelle ;
  • de participer au diagnostic de l’état de la politique d’égalité professionnelle et au suivi de la mise en oeuvre des actions menées par l’établissement.

Afin de mener à bien leur mission, ces référents égalité devront bénéficier d’un parcours de formation portant sur les enjeux liés à l’égalité professionnelle et à la lutte contre les violences sexuelles, le harcèlement sexuel et moral, et les agissements sexistes.

Ils disposent également de ressources et outils pédagogiques proposés par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

Prévu par le décret 2017-519 du 10 avril 2027, le référent déontologue est quant à lui chargé d’apporter à tout agent public qui le demande des conseils utiles au respect des principes déontologiques de la fonction publique dont l’impartialité, la neutralité, la laïcité, le respect de la liberté de conscience et de la dignité, les situations de conflit d’intérêts…

Même si chacun a un prisme d’action particulier s’agissant du respect des valeurs de la République, force est de constater un périmètre commun dans leurs champs d’action si l’on se place du point de vue de la seule neutralité des agents.

Cette pluralité de référents risque d’apporter de la confusion auprès des agents qui, saisis d’une interrogation ou d’une problématique réelle, pourraient avoir du mal à identifier le bon interlocuteur.

Par exemple, un agent féminin s’estimant discriminé par un collègue masculin qui ne lui adresse pas la parole au motif qu’elle est une femme : quel référent saisir ? Le référent laïcité ou le référent égalité voire le référent déontologue? Chacun en effet serait potentiellement légitime pour conseiller cet agent au regard de ses compétences et de son champ d’investigation, le but étant que l’agent puisse faire entendre sa problématique et trouver un relais pour l’accompagner.

L’enjeu est davantage dans le travail de collaboration que les référents ont à opérer entre eux afin de définir clairement les missions qui incombent à chacun, de relayer les demandes des agents auprès des bons interlocuteurs mais également de partager leurs approches et de mener un travail collaboratif sur des thématiques qui nécessairement seront communes à tous. Le rôle des référents étant axé sur le conseil et la prévention, la constitution d’un réseau tant géographique que thématique prend tout son sens et ne pourra qu’être bénéfique aux agents, voire aux usagers notamment si l’on inclut le champ de compétence du responsable des relations avec les usagers ainsi que celui du médiateur non médical (rappelons que le référent laïcité peut être appelé à intervenir lors d’un conflit entre un usager et un personnel à propos de l’application du principe de laïcité, voir plus haut), pour l’application des principes déontologiques de la fonction publique.

Une approche collégiale et partagée des réponses et conseils apportés aux agents n’en sera que plus fondée et légitime et pourrait être un gage d’efficacité dans le rôle dévolu à ces référents.

Conclusion

Des questionnements qui demeurent

Ainsi, le principe de laïcité se voit doté de nouveaux outils pour aider à sa bonne compréhension et appréhension, reste maintenant aux établissements de se les approprier et les faire vivre avec comme premier acteur le référent laïcité. Dernière pierre (actuelle) à cet édifice de longue haleine, ce principe sera-t-il le moyen, l’outil ultime pour aider à la mise en oeuvre réelle concrète d‘un principe qui semble avoir bien du mal à s’implanter face à des incompréhensions ou revendications individuelles ?

L’un des premiers défis du référent laïcité sera sans doute de ne pas incarner une nouvelle strate à la pyramide infernale des constructions administratives mais au contraire de devenir un acteur incontournable dans la ré-interrogation des comportements.


[1] Déjà depuis 2016 un dispositif avait été mis en place avec la circulaire du 15 mars 2017 relative au respect du principe de laïcité dans la fonction publique, mais aussi en élevant l’obligation de respect du principe de laïcité au rang de valeur déontologique (art. 25 de loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires).

[2] Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant les principes de la République.

[3] Décret n° 2021-1802 du 23 décembre 2021 relatif au référent laïcité dans la fonction publique, décret n°2022-237 du 24 février 2022 relatif aux échanges entre le référent laïcité des établissements mentionnés à l’article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales et les agences régionales de santé concernant les manquements à l’exigence de neutralité.

[4] Instruction n° SGMCAS/Pôle Santé ARS/2022/39 du 9 février 2022 relative à l’organisation du ministère des Solidarités et de la Santé pour la mise en oeuvre de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant les principes de la République.

[5] I. Génot, C. Poppe « Laïcité à l’hôpital : un principe constant et uniforme, une pratique de terrain évolutive et variée », RHF, n°568, janvier-février 2016.

[6] CE, 6 avr. 2001, nos 219379, 221699, 221700, Syndicat national des enseignements du second degré.

[7] https://www.gouvernement.fr/qu-est-ce-que-la-laicite

[8] Art. 1, loi du 9 décembre 1905 « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. »

[9] Codification de l’article 25 de la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 dit « loi Le Pors ».

[10] Art. L. 61112-1 : « Le service public hospitalier exerce l’ensemble des missions dévolues aux établissements de santé par le chapitre Ier du présent titre ainsi que l’aide médicale urgente, dans le respect des principes d’égalité d’accès et de prise en charge, de continuité, d’adaptation et de neutralité et conformément aux obligations définies à l’article L. 6112-2.

[11] Conseil d’État M. A… 12/02/2020 – Requête(s) : 418219 – Le praticien étranger accueilli en tant que stagiaire associé doit respecter le principe de laïcité.

[12] Loi portant déontologie des fonctionnaires – La création et désignation du référent déontologue, circulaire 2017 relative à laïcité dans la fonction publique. Mais aussi les documents et kits pédagogiques « Les valeurs de la République et la laïcité de 2018 ».

[13] Cf. note 2.

[14] La mise en place de référents laïcité s’inscrit dans les 17 décisions annoncées en juillet 2021 par le Premier ministre. Elle sera effective en 2022 et accompagnera le déploiement des formations à la laïcité de tous les agents publics d’ici à 2025.

[15] Cf. note 3.

[16] Article 1 du décret du 23 décembre 2021.

[17] Le référent laïcité est tenu au secret et à la discrétion professionnelle dans le cadre de sa mission. Il peut donc inspirer confiance.

[18] Cf. note 3.

[19] Instruction de la DGOS du ministère des Solidarités et de la Santé, datée du 5 août 2021 et publiée au bulletin officiel Santé-Protection sociale- Solidarité du 29 octobre 2021.