Billet d’humeur – Réforme des autorisations d’imagerie : attention à vos coopérations !
Brigitte de Lard-Huchet, directrice du centre de droit JuriSanté du CNEH
Les décrets relatifs aux conditions techniques et d’implantation des activités de soins sortent au compte-goutte.
Déjà 7 activités dotées de textes nouveaux ou refondus.
Une des nouveautés majeures de la réforme consiste à modifier l’approche du cadre d’autorisations des équipements matériels lourds d’imagerie.
- S’agissant des appareils d’imagerie en coupe, IRM et scanner, le code de la santé publique (CSP) continue de fixer la procédure d’autorisation du point de vue des équipements. Les principaux changements résident dans :
- la mise en place d’une fourchette de nombre d’appareils autorisés, ce qui permet de sortir partiellement d’une logique d’autorisation machine par machine,
- la mise en place de conditions techniques et d’implantation pour le titulaire de l’autorisation.
- De même, une reconnaissance réglementaire de la radiologie interventionnelle est opérée par les décrets 2022-1237 et 2022-1238 du 16 septembre 2022, avec, là encore un « cahier des charges » réglementaire pour la mise en œuvre de ce qui est désormais reconnu comme une activité de soins à part entière.
- Enfin, deux décrets 2021-1930 et 2022-114 sont venus reconnaître, là encore, comme une activité de soins autorisée à part entière, la médecine nucléaire. Plus d’autorisation d’appareils désormais, mais une procédure couvrant l’ensemble de l’activité, avec ici encore une fourchette d’équipements installables, et des conditions techniques et d’implantation.
Apparaissent ainsi deux nouvelles activités de soins : médecine nucléaire et radiologie interventionnelle.
Un questionnement surgit donc : quid des équipements de radiologie, et surtout de médecine nucléaire, jusqu’à présent non considérés comme relevant d’une activité de soins autorisée, lorsqu’ils sont gérés par les établissements publics de santé dans le cadre de coopérations organiques, de type GIE (groupement d’intérêt économique) ou GCS (groupement de coopération sanitaire) ? Car ces structures étaient jusqu’à présent exploitantes ou titulaires d’autorisations d’équipements, et non d’autorisations d’activités de soins. Avec la réforme qui entrera en vigueur en 2023, que deviendront-elles ?
- S’agissant du GIE, un avis de la section sociale du Conseil d’Etat en date du 1er août 1995 avait rappelé que le GIE n’était qu’un outil « par exception » de la coopération sanitaire : « si la création [d’un groupement d’intérêt économique] peut ouvrir la voie à une future fusion d’établissements, ou au contraire à un certain démembrement d’un établissement de santé, ledit groupement ne saurait en aucun cas être lui-même en charge des missions de diagnostic, de surveillance et de soins qui sont (…) celles de l’établissement de santé ». Un GIE ne pourrait donc pas exercer d’activité de soins, n’ayant juridiquement pas été conçu pour cela, tandis que d’autres outils de coopération ad hoc existent.
- Quant au GCS, s’il est titulaire d’une autorisation d’EML, il reste un GCS de moyens, avec une gouvernance et des contraintes juridiques somme toute acceptables. Mais si le GCS doit évoluer vers un statut de titulaire d’autorisation d’activité de soins, il devra alors être érigé en établissement de santé, « avec les droits et obligations afférents », conformément à l’article L.6133-7 CSP. Une sacrée usine à gaz en perspective !
Au final : un GIE ne pourrait pas porter d’autorisation de médecine nucléaire ? Quant au GCS, il le pourrait, à la stricte condition de devenir établissement de santé ?
Une sacrée remise en question des nombreux GCS et GIE de médecine nucléaire aujourd’hui en fonctionnement, et des incertitudes juridiques à lever sans tarder…