Fiche de synthèse – Nouveau domaine d’intervention pour les infirmiers en pratique avancée : l’urgence
Laurette Vilard, juriste, apprentie du centre de droit JuriSanté du CNEH
Annoncée depuis 2019, l’arrivée de l’infirmier en pratique avancée (IPA) aux urgences est désormais effective. Le décret du 25 octobre 2021 relatif à l’exercice en pratique avancée de la profession d’infirmier dans le domaine d’intervention des urgences vient de paraître dans le Journal Officiel[1], accompagné de son arrêté venant fixer la liste des motifs de recours confiés à l’IPA aux urgences[2].
Historique de l’infirmier en pratique avancée (IPA)
Le poste d’Infirmier en Pratique Avancée a été créé, par l’article 119 de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé afin d’améliorer l’accès aux soins ainsi que la qualité des parcours des patients, tout en réduisant la charge de travail des médecins sur des pathologies ciblées. Les IPA permettent ainsi un décloisonnement et une transversalité des acteurs de soin.
L’infirmier exerçant en pratique avancée dispose de compétences élargies, par rapport à celles de l‘infirmier diplômé d’État (IDE). L’IPA justifie de ce statut par la validation d’un diplôme d’État en deux ans, précisant la mention choisie, et remis par une des universités les délivrant. Le diplôme d’IPA est accessible aux infirmiers après au moins trois ans de pratique du métier.
Les IPA interviennent originairement dans l’un des quatre domaines d’intervention définis à l’article R. 4301-2 du Code de santé publique, qui sont :
- Les pathologies chroniques stabilisées ;
- L’oncologie et l’hémato-oncologie ;
- La maladie rénale chronique, la dialyse, la transplantation rénale ;
- La psychiatrie.
Ces champs de compétence peuvent être exercés soit au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par un médecin, soit en assistance d’un médecin spécialiste hors soins primaires, soit au sein d’une équipe de soins d’un centre médical du service de santé des armées coordonnée par un médecin des armées.
Il ne faut pas confondre les protocoles de coopération et les IPA, qui peuvent sembler similaires alors que leur mécanisme est bien distinct. D’un côté, les protocoles de coopération sont des délégations de compétence sur un acte ou sur un groupe d’actes déterminés. L’élargissement de compétences peut concerner dans ce cas tout professionnel de santé, mais sur un périmètre très limité, et dans le cadre d’un protocole national ou local déclaré à l’ARS. Tandis que, de leur côté, les IPA voient leurs compétences globalement élargies pour la prise en charge d’une famille de pathologies par le biais de la formation dispensée pendant deux ans.
L’IPA d’urgence
Par la parution de ces nouveaux textes, le champ de compétence de l’IPA a été étendu en créant un cinquième domaine d’intervention : celui des urgences. L’objectif étant de permettre une fluidité des parcours de soin des patients mais surtout, de limiter l’engorgement et la saturation des services des urgences.
Les domaines normalement réservés aux IPA touchant jusqu’ici à la prise en charge de pathologies chroniques, ce nouveau champ d’intervention apporte une nouvelle perspective qui est celle des soins en phase aigüe ou non programmée.
Pour que l’IPA puisse exercer, l’établissement de santé devra avoir en sa possession une autorisation pour exercer une activité de soins de médecine d’urgence.
Dès lors, les textes expliquent le champ d’autonomie octroyé aux futurs IPA d’urgence. Deux parcours peuvent donc se distinguer :
- Le premier confère à l’IPA d’urgence la participation « à la prise en charge des urgences vitales ou complexes pour les motifs de recours et les situations cliniques les plus graves ou complexes ». Cependant, cette prise en charge du patient lui est confiée par décision du médecin et l’infirmier reste sous sa conduite diagnostique tout au long du parcours de soin. Les motifs de recours qui déclenchent ce type de parcours sont, par exemple, le syndrome coronarien aigu, l’intoxication médicamenteuse, et les diarrhées ou vomissements du nourrisson.
- Le second permet à l’IPA de prendre en charge « les motifs de recours et les situations cliniques présentant un moindre degré de gravité ou de complexité ». Dans ce cas de figure, l’IPA a des compétences plus larges que dans le parcours précédent. Il peut prendre en charge dans sa globalité le parcours de soin du patient et établir des conclusions cliniques, tant qu’à un moment donné dans le suivi un médecin intervienne. Les motifs de recours qui déclenchent ce type de parcours sont, par exemple, un abcès ou une infection localisée de la peau, un hoquet, ou l’ingestion d’un corps étranger sans signe de gravité.
Les IPA d’urgence ont des compétences élargies par rapport aux IDE, mais ils restent sous la supervision d’un médecin.
On notera qu’à la différence des quatre autres domaines d’intervention des IPA, l’IPA aux urgences ne dispose pas d’une liste supplémentaire d’actes relevant de son autonomie de décision et d’action. L’approche de la fonction se fonde ici sur une typologie des cas de prise en charge, et non sur un ensemble de gestes techniques qui lui sont dévolus. Une attention particulière devra être portée dans ces conditions à la rédaction du protocole organisationnel qui doit être rédigé pour encadrer la pratique avancée dans l’unité.
[1] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044245734
[2] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044293333